Comme d'habitude, il n'avait aucune
idée de ce qui adviendrait de son texte. S'il convenait, il
paraîtrait, signé du nom de son boss, caviardé des nuances et de la
complexité de l'analyse. Sinon il n'en resterait qu'une caricature
sans base ni sommet pour remplir l'espace d'une pub non attribué
avec ses initiales. Souvent le fichier atterrissait dans la
corbeille.
Il longeait la Seine.
Vers l'ouest doucement
le soleil déclinait.
L’œuvre ne l'avait pas inspirée,
son histoire en revanche l'avait interpellé. Comme une répétition
sans fin. Symptôme de la ré-émergence des pratiques
d'asservissement dont les trente glorieuses avaient fait croire à la
disparition.
Sur l'autre rive
une vieille dame incarnée
derrière des palissades.
Sa petite amie, en le présentant à
ses parents, l'avait dit "critique d'art". Cela avait plus
d'allure que poète. Moins inquiétant, quoique. Il avait envie de
gueuler à l'eau noire "plus de gueule". Ce contrat à
durée indéterminée était une aubaine pour se loger et ils avaient
besoin de leur caution.
Un beau soir d'avril
les âmes des anonymes
pleuraient leur chef d’œuvre.
Demain sans doute les enchères
grimperaient dans d'autres tours. Quelqu'un achèterait un nom.
L'objet passerait d'un coffre à un autre. Il pensa à cette citation
de Raymond Poincaré lu sur un des blogs où il aimait se détendre
et se ressourcer : « Une œuvre d’art n’est jamais immorale.
L’obscénité commence où l’art finit ».
L'arrogance des marchés
la quête vaine du barbouilleur
étaient dérisoires.
Vers les tours de la Défense
Le Soleil griffait les toits.
©Jeanne Fadosi, jeudi 12 septembre 2019
à découvrir le vendredi soir ou le samedi
avec les autres brins sur la page 149 de L'Herbier
Etre connu, reconnu un jour qu'importe son don… beaucoup d'appelés mais peu d'élus, en vivre ah… l'espoir de tout artiste, bravo Jeanne, bises
RépondreSupprimerExcellente participation à relever le défi, Jeanne !
RépondreSupprimerBon et beau vendredi,
Bises♥
C'est une magnifique page, merci, Jeanne.
RépondreSupprimerSe faire voler son oeuvre est terrible, même si, finalement, le fait qu'on la vole lui donne plus de valeur. ;)
Passe une douce journée, bisous.
Vraiment magnifique, Jeanne, je viens de publier seulement la page. Merci pour cette participation.
RépondreSupprimertant d'artistes ont oeuvré dans l'ombre, ont espéré être reconnus pour leur art mais les élus sont peu nombreux, c'est tellement alléatoire, le vol est impardonnable
RépondreSupprimerbeau texte jeanne
Ta participation est vraiment excellente tu touches avec délicatesse et beaucoup de justesse la situation de tant d'artistes. Bravo !
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