Chaque jour je n'oublie pas Anne-Sophie et ses compagnes d'infortune

145 en 2010 ; 122 en 2011 ; 148 en 2012 ; 121 en 2013 ; 118 en 2014 ; 122 en 2015, 123 en 2016, encore 123 en 2017, 121 en 2018 ? 101 femmes depuis le 1e janvier 2019 en France (2 septembre 2019) , soit une femme tous les deux jours ! accélération ou meilleure visibilité ?

(clic sur le lien pour comprendre ... un peu)

lundi 18 janvier 2021

D'une année l'autre

 Pour une nouvelle page de l'Herbier de poésie sur un poème de Marine

1er janvier 2021, 10 heures du matin

Nul chant dans la campagne vide,
le givre a tout figé.
Même la serrure du portillon était bloquée.
Vers l'est, la brume s'effiloche en grands lambeaux
devant le soleil blême, comme un voile usé de mariée.
Au loin vers le nord, sur la ligne d'horizon,
les platanes de la grand route suspendent leurs points flous et réguliers.
Le temps bascule d'une année l'autre,
quelques mois imprévisibles que tous souhaitent archiver au passé,
vers un futur aussi indéchiffrable que le paysage.
Dix heures du matin ! Solitude bienvenue même si je la subis.
La lumière tremble et sublime le réel,
la mare, les champs, les éteules, les haies.

C'est dans la nuit insomniaque
que je convoque les vieux souvenirs,
ceux qui mettent du baume sur les plaies,
quand un cauchemar, aussitôt oublié,
m'ont tiré d'un somme et affole mon coeur.

Au spectacle ici et maintenant, je choisis la contemplation.
Un joggeur, qui m'aurait croisée à deux ou trois mètres,
fait un plus large détour sans décrocher une parole.
Je ravale les mots au bord des lèvres.
Un chien court à côté d'une cycliste qui, elle aussi,
répond à peine à un bonjour.
Mon "bonne année" se perd dans son sillage.
Vers l'orient d'où arrive un autre promeneur,
elle sera bien obligée de mettre pied à terre.

J'ai les doigts gourds sous les gants.
C'est le temps du retour à l'abri de chez soi.
L'air est immobile, suspendu à la lisière
entre deux âges, entre deux mondes.
En cet instant fuyant, sourire, juste sourire.
"Tous les matins du monde sont sans retour"*
©Jeanne Fadosi, jeudi 14 janvier 2021
à découvrir à partir de lundi
avec les autres brins sur la page 168 de l'Herbier


*aphorisme complet tiré du livre de Pascal Quignard et du film de Alain Corneau « Tous les matins du monde », 1991.


Lisière


Marchant sur ce chemin

de flaques et d'ombres

Le froid craque sous les pas

craquelle la peau

Un oiseau siffle quelque part

Je vais puiser loin et profond

des joies anciennes

La glace brille et enjolive

la cime des arbres

A la lisière des arabesques

griffent le ciel

en vagues brunes

Donne moi ce petit rien

ce sourire si attendu

arc en ciel silencieux

quand rôde le doute

je regarde du côté du levant

Tout viendra un jour.



Marine D

14 commentaires:

  1. La société n'a plus grand égard envers autrui, à peine un bonjour un mot comme si on était pestiférée, Covid ou pas ! Et même si les matins reviendront pareil, merci la vie ,-) Bises

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  2. Un très beau ressenti de cet isolement dans la société qui nous entoure et qui ne fait surtout aucun effort pour s'occuper de son prochain.
    C'est tout de même triste Jeanne.
    Bises et bon début de semaine

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  3. Merci pour ce partage Jeanne, tu as bien campé le paysage et j'aime beaucoup la fin..."Tous les matins du monde sont sans retour"
    Bises

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  4. Un tres beau texte Jeanne avec cette atmosphère si particulière de ce début d'année
    Bonne journée
    Bises

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  5. La photo du paysage est très belle aussi !

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  6. Hélas !
    La pandémie nous fait ravaler nos souhaits... nous fait aussi changer de trottoir... pour quoi ?
    Je ne sais pas.
    Mon frère m'a dit qu'on se souhaitait désormais "bon courage" au lieu du "Bonjour" habituel... ça m'a fait réfléchir.
    La vie n'était-elle plus digne d'être partagée d'un sourire...?
    Passe une douce journée. Merci pour ta si belle page.

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  7. Les gens ont perdu le sens du contact avec la peur du covid.mais quand même ! Une promenade solitaire dans le matin froid,ce n'est peut-être pas le grand bonheur mais cela donne une certaine paix tranquille... Bise

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  8. Les matins du monde ouvrent la porte aux possibles
    qu'allons nous écrire sur la page blanche
    force de l'envie, fol espoir du neuf
    quelques heures et revient la nuit
    demain peut-être, demain sûrement
    n'attendons plus
    après-demain il sera déjà trop tard...

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  9. « archiver au passé,
    vers un futur aussi indéchiffrable que le paysage. »
    ..... Merveilleuse photo qui nous parle de la chaleur des jours à venir, tandis qu la Vie s’active danC ces champs saupoudrés de neige !

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  10. « archiver au passé,
    vers un futur aussi indéchiffrable que le paysage. »
    ..... Merveilleuse photo qui nous parle de la chaleur des jours à venir, tandis qu la Vie s’active danC ces champs saupoudrés de neige !

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  11. Bonsoir Jeanne,

    La société actuelle s'oriente dans une direction qui ne me plaît pas du tout. Elle est inhumaine je trouve dans bien des choses du quotidien. Mais, si l'on peut, avant le couvre-feu, se promener dans un coin de nature, on a l'impression de se libérer d'un poids.

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  12. Je t'ai mis un commentaire hier qui n'apparait pas ici, et tu as un écho chez moi, aujourd'hui.

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    1. Désolée, hier j'étais en mode sans ordi. Je vais d'unb clic sur ton blog

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  13. Comme dans un film où le son serait absent, une bouche s'ouvre, exhale un peu de vapeur et des mots invisibles qui restent solitaire. L'indifférence semble partout alentour, et pourtant... qui pourrait rester insensible à cette bouche muette ? Merci pour ce très beau poème.

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