Pour une nouvelle page de l'Herbier de poésie sur un poème de Marine
Nul chant dans la campagne vide,
le givre a tout figé.
Même la serrure du portillon était bloquée.
Vers l'est, la brume s'effiloche en grands lambeaux
devant le soleil blême, comme un voile usé de mariée.
Au loin vers le nord, sur la ligne d'horizon,
les platanes de la grand route suspendent leurs points flous et réguliers.
Le temps bascule d'une année l'autre,
quelques mois imprévisibles que tous souhaitent archiver au passé,
vers un futur aussi indéchiffrable que le paysage.
Dix heures du matin ! Solitude bienvenue même si je la subis.
La lumière tremble et sublime le réel,
la mare, les champs, les éteules, les haies.
C'est dans la nuit insomniaque
que je convoque les vieux souvenirs,
ceux qui mettent du baume sur les plaies,
quand un cauchemar, aussitôt oublié,
m'ont tiré d'un somme et affole mon coeur.
Au spectacle ici et maintenant, je choisis la contemplation.
Un joggeur, qui m'aurait croisée à deux ou trois mètres,
fait un plus large détour sans décrocher une parole.
Je ravale les mots au bord des lèvres.
Un chien court à côté d'une cycliste qui, elle aussi,
répond à peine à un bonjour.
Mon "bonne année" se perd dans son sillage.
Vers l'orient d'où arrive un autre promeneur,
elle sera bien obligée de mettre pied à terre.
J'ai les doigts gourds sous les gants.
C'est le temps du retour à l'abri de chez soi.
L'air est immobile, suspendu à la lisière
entre deux âges, entre deux mondes.
En cet instant fuyant, sourire, juste sourire.
"Tous les matins du monde sont sans retour"*
*aphorisme complet tiré du livre de Pascal Quignard et du film de Alain Corneau « Tous les matins du monde », 1991.
Lisière
Marchant sur ce chemin
de flaques et d'ombres
Le froid craque sous les pas
craquelle la peau
Un oiseau siffle quelque part
Je vais puiser loin et profond
des joies anciennes
La glace brille et enjolive
la cime des arbres
A la lisière des arabesques
griffent le ciel
en vagues brunes
Donne moi ce petit rien
ce sourire si attendu
arc en ciel silencieux
quand rôde le doute
je regarde du côté du levant
Tout viendra un jour.
La société n'a plus grand égard envers autrui, à peine un bonjour un mot comme si on était pestiférée, Covid ou pas ! Et même si les matins reviendront pareil, merci la vie ,-) Bises
RépondreSupprimerUn très beau ressenti de cet isolement dans la société qui nous entoure et qui ne fait surtout aucun effort pour s'occuper de son prochain.
RépondreSupprimerC'est tout de même triste Jeanne.
Bises et bon début de semaine
Merci pour ce partage Jeanne, tu as bien campé le paysage et j'aime beaucoup la fin..."Tous les matins du monde sont sans retour"
RépondreSupprimerBises
Un tres beau texte Jeanne avec cette atmosphère si particulière de ce début d'année
RépondreSupprimerBonne journée
Bises
La photo du paysage est très belle aussi !
RépondreSupprimerHélas !
RépondreSupprimerLa pandémie nous fait ravaler nos souhaits... nous fait aussi changer de trottoir... pour quoi ?
Je ne sais pas.
Mon frère m'a dit qu'on se souhaitait désormais "bon courage" au lieu du "Bonjour" habituel... ça m'a fait réfléchir.
La vie n'était-elle plus digne d'être partagée d'un sourire...?
Passe une douce journée. Merci pour ta si belle page.
Les gens ont perdu le sens du contact avec la peur du covid.mais quand même ! Une promenade solitaire dans le matin froid,ce n'est peut-être pas le grand bonheur mais cela donne une certaine paix tranquille... Bise
RépondreSupprimerLes matins du monde ouvrent la porte aux possibles
RépondreSupprimerqu'allons nous écrire sur la page blanche
force de l'envie, fol espoir du neuf
quelques heures et revient la nuit
demain peut-être, demain sûrement
n'attendons plus
après-demain il sera déjà trop tard...
« archiver au passé,
RépondreSupprimervers un futur aussi indéchiffrable que le paysage. »
..... Merveilleuse photo qui nous parle de la chaleur des jours à venir, tandis qu la Vie s’active danC ces champs saupoudrés de neige !
« archiver au passé,
RépondreSupprimervers un futur aussi indéchiffrable que le paysage. »
..... Merveilleuse photo qui nous parle de la chaleur des jours à venir, tandis qu la Vie s’active danC ces champs saupoudrés de neige !
Bonsoir Jeanne,
RépondreSupprimerLa société actuelle s'oriente dans une direction qui ne me plaît pas du tout. Elle est inhumaine je trouve dans bien des choses du quotidien. Mais, si l'on peut, avant le couvre-feu, se promener dans un coin de nature, on a l'impression de se libérer d'un poids.
Je t'ai mis un commentaire hier qui n'apparait pas ici, et tu as un écho chez moi, aujourd'hui.
RépondreSupprimerDésolée, hier j'étais en mode sans ordi. Je vais d'unb clic sur ton blog
SupprimerComme dans un film où le son serait absent, une bouche s'ouvre, exhale un peu de vapeur et des mots invisibles qui restent solitaire. L'indifférence semble partout alentour, et pourtant... qui pourrait rester insensible à cette bouche muette ? Merci pour ce très beau poème.
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