Chaque jour je n'oublie pas Anne-Sophie et ses compagnes d'infortune

145 en 2010 ; 122 en 2011 ; 148 en 2012 ; 121 en 2013 ; 118 en 2014 ; 122 en 2015, 123 en 2016, encore 123 en 2017, 121 en 2018 ? 101 femmes depuis le 1e janvier 2019 en France (2 septembre 2019) , soit une femme tous les deux jours ! accélération ou meilleure visibilité ?

(clic sur le lien pour comprendre ... un peu)

jeudi 16 septembre 2021

Monologues poétiques et comiques, de Charles -Ernest Lemaître

 Jill Bill prend la barre pour la première croisière d'écriture des CROQUEURS DE MOTS de la saison 21-22 avec le défi n°253 et pour le premier jeudi poésies elle nous dit :

Pour le jeudi 16 septembre poème dans un patois... yes

Bigre ! J'ai requis "poème patois normand". Oui vous le savez, je suis née et j'ai grandi en Normandie.
J'ai tout simplement suivi la première occurrence Le Patois normand : textes en ligne sur bmlisieux.com. J'en déduis que bm signifie bibliothèque municipale. Difficile de repérer les poèmes dans la table des matières mais enfin j'en ai trouvé avec la mention Diffusion libre et gratuite (freeware)

Le hic, et il n'est pas mince, c'est que les textes sont livrés bruts, sans traduction. Quel monologue poétique et comique choisir ? Pour faire un clin d'œil aux actualités j'aurais eu un faible pour Brigand d'apoticaire (sic) dans C. Lemaître : Monologues poétiques et comiques - 1. (bmlisieux.com) mais je crains le manque complet de sens de l'humour qui sévit sur la Toile et ailleurs et comme je ne veux pas me fâcher avec mon médecin ... ou bien Les Sept Pêchés Capitaux C. Lemaître : Monologues poétiques et comiques - 2. (bmlisieux.com)

J'ai finalement choisi (traduction approximative à la fin des strophes) :    

Défunt man Père

I
Quand ej' cause ed' défunt man père,
Y m'en vient co dé larm's é z'yeux ;
Cha n’tait pas un homme ordinaire,
Et j'en s'rai terjous respectueux.
Il était bi guéri d'êt' bête,
D'avec six pétiots à él'ver ;
Il a terjous resté honnête,
Du moins no n'l'a jamais happé.
Hélas bon Dieu, qui triste sort,
Faut'y qu'un si bouenhomme sé mort ?
Défunt mon Père

I
Quand je parle de mon défunt Père,
Il m'en vient encore des larmes aux yeux ;
Ce n'était pas un homme ordinaire,
Et j'en serai toujours respectueux.
Il était bien guéri d'être bête,
Avec six petits à élever ;
Il est toujours resté honnête,
Du moins on ne l'a jamais attrapé.
Hélas bon Dieu, quel triste sort,
Faut-il qu'un si bon homme soit mort ?

II
Cu les fermiers du voisinage,
Quand par hasard y travaillait ;
Por mettr’ l'aisance dans san ménage,
Y rapportait tout c'qu'y pouvait.
Il avait d'z'oeufs à plein's pouquettes,
Por pas que j'mangions not' pain sec ;
Et quand y n'craignit pas qu'no l'guette,
Y rapportait la poule avec.
Chez les fermiers du voisinage,
Quand par hasard il travaillait ;
Pour mettre de l'aisance dans son ménage,
Il rapportait tout ce qu'il pouvait.
Il avait des œufs plein les poches,
Pour qu'on ne mange pas notre pain sec ;
Et quand il ne craignait pas qu'on le guette,
Il rapportait la poule avec.

III
Je n'manquions jamais d'pomm's de terre,
Tant qu'yen avait cu lé vésins ;
Et dé provisions d'tout's manières,
Qu'not' pèr' trouvait tous lé matins.
Car, c'est eun' justice à l'y rendre,
Qu'y fut terjous bi matina ;
Surtout quand il avait d'qué prendre
Avant que l'jou ne l'gên' por cha.
Je ne manquais jamais de pommes de terre,
Tant qu'il y en avait chez les voisins ;
Et de toutes sortes de provisions
Que notre père trouvait tous les matins.
Car, c'est une justice à lui rendre,
Qu'il fut toujours bien matinal ;
Surtout quand il avait de quoi prendre
Avant que le jour ne le gêne pour cela.
 
IV
Quand y trouvait eun' cave ouverte,
Malgré qu'cha n'fût pas un saôlard,
Y profitait d'sa découverte,
Et en prenait p't'êt' pu qu'sa part.
Craignant qu'sé bragu's n'séent pas nettes,
Lé gens qui l'trouvaient sous l'tonné ;
No l'rapportaient dans eun' bérouette :
Fallait t'y qu'y fût estimé ?
Quand il trouvait une cave ouverte,
Malgré que ça ne fût pas un saoulard,
Il profitait de sa découverte,
Et en prenait peut-être plus que sa part.
Craignant que ses caleçons ne soient pas nets,
Les gens qui le trouvaient sous le tonneau
Nous le rapportaient dans une brouette :
Fallait-il qu'il fût estimé ?

V
Y respectait tant la justice,
Qu'y s'écappait dé magistrats ;
Et qu'il attrappait la jaunisse,
Rin qu'en causant dé z'avocats.
Comme y disait: « No devrait pendre,
Tous lé vieux maladrets d'voleux,
Qu'ont la bêtis' de s'laissi prendre.
D'qué qui rend l'mond' si soupçoureux. »
Il respectait tant la justice,
Qu'il s'échappait des magistrats ;
Et qu'il attrapait la jaunisse,
Rien qu'en parlant des avocats.
Comme il disait : "On devrait pendre,
Tous les vieux maladroits de voleurs,
Qu'ont la bêtise de se laisser prendre,
Ce qui rend le monde si soupçonneux."
 
VI
Tant qu'y vécut çu paur' cher homme,
Y n'no z'a jamais rin manqui ;
Et sans qu'jamais qu'il ach'tît d'pommes,
Not' tonné, d'bère était rempli.
Y s'portit terjous comme un charme,
A chinquante ans, tout preus d'sa fin,
Dès qu'y véyait v'ni un gendarme,
Y couérait co comme un lapin ?
Tant qu'il vécut ce pauvre cher homme,
Il ne nous a jamais manqué de rien ;
Et sans jamais qu'il achetât des pommes
Notre tonneau était rempli pour boire.
Il se portait toujours comme un charme,
A cinquante ans, tout près de sa fin,
Dès lors ne voyait-il pas un gendarme,
Qu'il courait encore comme un lapin ?

VII
Enfin, not' pèr' vécut sans tache,
En honnête homm' jusqu'à la fin,
Qui l'y vint, rapport à eun' vache,
Qu'il avait trouvée l'long d'un ch'min.
Un gas qui dit qu'c'était la sienne,
S'en vint cu nous por la r'trachi,
Et l'paur' bouenhomme en eut tant d'peine
Que c't'émotion-là l'fit mouéri.
Hélas bon Dieu, qui triste sort,
Faut'y qu'un si bouenhomm' sé mort?
Enfin, notre père vécut sans tache,
En honnête homme jusqu'à la fin,
Qui lui vint à cause d'une vache,
Qu'il avait trouvée le long d'un chemin.
Un gars qui dit que c'était la sienne,
S'en vint chez nous pour la reprendre,
Et le pauvre bonhomme en eut tant de peine
Que cette émotion-là le fit mourir.
Hélas bon Dieu, quel triste sort,
Faut-il qu'un si bon homme soit mort ?

Charles-Ernest Lemaître, 1854 - 1928

La paye des moissonneurs
Léon Lhermitte 1888

Le journalier, Ralph Hedley, britannique, XIXes

6 commentaires:

  1. Merci Jeanne, même sans la traduction j'avais compris le thème du pauvre chef de famille, mais travailleur, même si il savait lever le coude à l'occasion... j'ai apprécié ! Bises jill

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  2. Bonjour Jeanne, tout à fait super, ton choix ! J'♥ beaucoup ! Bravo !!! Bon jeudi tout entier. Bises♥

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  3. Excellent choix Jeanne, j'aime beaucoup cet humour pour nous parler de son père . Bonne journée
    Bises
    Jazzy57

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  4. excellent ...on lit aisément je ne suis pas certaine de l'entendre aussi bien
    merci Jeanne

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  5. Comme i est beau ce poème que je découvre tardivement. Bisous

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  6. Superbe choix
    La vie n'est pas toujours simple
    Bon dimanche
    Bisous

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