Laura, à la manœuvre pour le défi n°249 (et non 149 comme sur son site) des CROQUEURS DE MOTS nous demande pour le jeudi poésie du 15 avril qu'il soit question de Pâques tout juste passé. Puis pour le défi du lundi 19 avril de raconter sans parler ni de Pâques, ni de la Pentecôte, ce que font des gens un lundi férié et enfin pour le jeudi suivant 22 avril qu'il soit question d'ascension religieuse ou pas. Ouf !
Vous le savez le jeudi je privilégie le partage de poésies choisies à l'exercice d'écriture mais le sujet m'inspirait des réserves sur la possibilité de trouver un poème qui sorte des connotations obligatoirement religieuses ou qui soient des comptines pleines de confiseries. J'ai donc retroussé mes manches pour puiser dans les archives de mon blog initial. J'ai même découvert que je pouvais sans trop d'efforts en faire une sorte de haibun. Vous le trouverez à Des cloches et des œufs.
Entre temps le Web m'a fait connaître Œufs de Pâques, ce poème de Marcel Pagnol que vous connaissez déjà sans doute.
Il m'a rappelé le bruit de l'œuf dur, terrible dans la tête de l'homme qui a faim, tel que le disait Jacques Prévert et le chantait Mouloudji sur la musique de Joseph Kosma
La grasse matinée
Il est terribleLe petit bruit de l'œuf dur cassé sur un comptoir d'étainIl est terrible ce bruitQuand il remue dans la mémoire de l'homme qui a faimElle est terrible aussi dans la tête de l'hommeLa tête de l'homme qui a faimQuand il se regarde à six heures du matinDans la glace du grand magasinUne tête couleur de poussièreCe n'est pas sa tête pourtant qu'il regardeDans la vitrine de chez PotinIl s'en fout de sa tête l'hommeIl n'y pense pasIl songeIl imagine une autre têteUne tête de veau par exempleAvec une sauce de vinaigreOu une tête de n'importe quoi qui se mangeEt il remue doucement la mâchoireDoucementEt il grince des dents doucementCar le monde se paye sa têteEt il ne peut rien contre ce mondeEt il compte sur ses doigts un deux troisUn deux troisCela fait trois jours qu'il n'a pas mangéEt il a beau se répéter depuis trois joursCa ne peut pas durerCa dureTrois joursTrois nuitsSans mangerEt derrière ces vitresCes pâtés ces bouteilles ces conservesPoissons morts protégés par les boîtesBoîtes protégées par les vitresVitres protégées par les flicsFlics protégés par la crainteQue de barricades pour six malheureuses sardines..Un peu plus loin le bistrotCafé-crème et croissants chaudsL'homme titubeEt dans l'intérieur de sa têteUn brouillard de motsUn brouillard de motsSardines à mangerŒuf dur café-crèmeCafé arrosé rhumCafé-crèmeCafé-crèmeCafé-crime arrosé sang !...Un homme très estimé dans son quartiera été égorgé en plein jourL'assassin le vagabond lui a voléDeux francsSoit un café arroséZéro franc soixante-dixDeux tartines beurréesEt vingt-cinq centimes pour le pourboire du garçon.
Jacques Prévert, Paroles, 1946
Joseph Kosma, compositeur français d'origine hongroise, 1905 - 1969
L'écouter chanté par Marianne Oswald ou Mouloudji (là je vais ressortir la platine pour écouter un vinyle qui a vu bien des fois l'aiguille du tourne-disques) ...
Merci de ce partage je ne connaissais pas ce poème de préfère que pourtant j'aime beaucoup. Il est poignant. Bisous
RépondreSupprimerCela faisait longtemps que je l'avais mis en ligne
SupprimerIl est terrible, comme l'écrit Prévert et comme le dit Mouloudji sur un disque qui est usé à force d'avoir été écouté
Excellent choix Jeanne, et beaucoup de plaisir de relire cette poésir de Prévert.
RépondreSupprimerBises et bon jeudi
Lire celui de Marcel Pagnol me l'a évoqué et je n'ai pas résisté à le remettre en ligne
SupprimerDe 1946... pas encore à l'euro, ce si cher euro... merci Jeanne, bises
RépondreSupprimerTout est relatif. Un œuf dur coutait cher en francs de l'époque ...
SupprimerDe part et d'autre de la vitrine deux mondes qui se croisent sans se regarder, et tout l'art de Prévert pour les évoquer.
RépondreSupprimerC'est l'un de mes poètes préférés depuis toujours
SupprimerBonjour,je ne connaissais pas du tout ce poème de 1946 de Jacques Prévert, il est très beau et émouvant. Bonne journée à vous
RépondreSupprimerà écouter chanté par Mouloudji aussi
SupprimerSuperbe choix, Jeanne ! Bravo !!! J'♥ beaucoup !!! Bonne poursuite de ce jeudi ! Bises♥
RépondreSupprimermerci Colette. J'ai fait un pas de côté pour ce poème
SupprimerUn poème époustouflant.
RépondreSupprimerBises
Il me donne toujours la chair de poule
Supprimerc'est excellent d'avoir penser à l'oeuf dur de Prévert...ça me rappelle en plus Mouloudji que j'allais écouter à Bobino dans une autre vie...
RépondreSupprimerTu es allée l'entendre à Bobino ! ce doit être un excellent souvenir !
SupprimerMerci pour cette belle découverte
RépondreSupprimeril ne fallait pas avoir peur de faire de la religion/tradition
car il y en a peu...
Ravie de l'avoir fait découvrir. Mais non merci pour le reste
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