Pour une nouvelle page de l'Herbier de poésie sur une vidéo présentant les sculptures cinétiques de Théo Jansen
A quoi rêvent les peupliers (1)
Rêver est impératif. Voilà une drôle d' injonction ! Il ne manque plus que le point d'exclamation ou le coup de pied aux fesses. Mais non, le texte qui déroule la suggestion pour la page ouvre grand les mots et les possibles avec un « si vous voulez rêver ». L'impératif est un mode de conjugaison facile à apprendre aux écoliers. Beaucoup moins à comprendre quand ils ont eu la chance d'une éducation bienveillante ou quand ils se sont forgé un caractère de rebelle ou de rêveur.
Rêver n'est pas une option. Les progrès des connaissances en neuro-sciences, somme toute pas si vieilles, nous ont appris que tout le monde rêve, du moins le monde mammifère, même ceux qui ne s'en aperçoivent jamais. Plus récemment encore, on a pu expérimenter sur des animaux que non seulement le sommeil était indispensable à la vie mais qu'un sommeil sans rêve conduisait à la dégradation de la santé et à la mort.
« Ouvrez grand vos yeux », ça, je peux, agir sur les paupières. Jusqu'à une certaine limite. Quoi ? J'entends déjà les adultes et les enfants en pleine vigueur. L'affaissement des paupières, qui peut gêner la vision, est le plus souvent l'un des nombreux désagréments du vieillissement. Raison de plus pour s'entraîner à ouvrir grand les yeux. Ouvrez grand le coeur. Aïe ! L'organe fonctionne en mode automatique même si quelquefois il envoie des signaux de faiblesse ou de détresse. Quant à ce que nous appelons « coeur » et qui évoque les sentiments, se commande-t-il aussi simplement ?
Regarder loin tout autour
L'impératif, si délicat à manier, m'a projeté dans mes blessures d'enfance. A l'école surtout. Fais ceci, fais pas ça. Arrête ! Apprends ! Sois sage ! Debout ! Assis ! Va plus vite ! Et mon grand âge m'a fait échapper aux dictats des plus jeunes. Réussis, sois le vainqueur. Gagnes ! Sois le premier ou rien ! A la maison j'étais une enfant relativement sage et qui s'accommodait des libertés entre les conventions. Rêver est la liberté suprême, celle qui échappe encore même à celui ou celle qui rêve. Du moins encore un peu. L'ultime frontière des humains.
A quoi rêvent les peupliers (2)
Ouvrir grand les yeux et le coeur, s'émerveiller ou être émerveillé, je sais faire. Je crois. Pas sur commande, juste quand j'ai vidé suffisamment mon cerveau de tant d'idées parasites. Ce matin, comme presqu'à chaque fois que j'emprunte cette petite route sinueuse de campagne, c'est une vieille habitude, un réflexe : vacuité et vigilance. Oui, les deux à la fois, c'est possible. Et utile quand on conduit. Au détour d'un virage, ils se dressaient en ondulant à peine sous un vent léger. Une dizaine de peupliers bordant sans doute une allée, les branches toutes nues déjà faisant comme des griffes dressées vers le ciel bas. Sauf à leur cîme un toupet vaillant de feuilles blondes. L'effet était étrange. Pourquoi le sujet de l'Herbier a-t-il surgi dans le décor ? Je me suis demandée à quoi rêvent les peupliers ?
Rêver c'est débarquer dans un autre monde, tout être vivant rêve, chien, chat, etc... et même les arbres, mais à quoi... !? Nous nous imaginons des choses en rêve ou sur papier et parfois les réalisons en vrai ;-) Ici l'inventeur a eu du génie !
RépondreSupprimerBonjour Jeanne,
RépondreSupprimerCe magnifique sujet t'a infusé de jolis mots. J'ai aimé les deux textes. Le rêve vital est là et on embarque volontiers à bord de sa bulle mouvante et scintillante.
Les peupliers ont forcément des rêves de grandeur !!! Quant à nous, sans rêve notre cerveau se meurt...
RépondreSupprimerBonjour Jeanne,
RépondreSupprimerTant de choses, d'êtres,nous connectent au rêve, ce besoin si pressant de nous évader des heures grises en nous enveloppant de joie et de sérénité.
Aujourd'hui,les créatures magnifiques de Théo Jansen nous ont ouvert la porte de merveilleux voyages !