Chaque jour je n'oublie pas Anne-Sophie et ses compagnes d'infortune de 145 en 2010 à 94 ou 103 ou 134 selon les sources en 2023

(clic sur le lien pour comprendre ... un peu)

jeudi 7 décembre 2017

Enfants délurées, au Grand Bal du Printemps de Jacques Prévert

Colette est à la barre du défi n°196 des CROQUEURS DE MOTS et sa feuille de route se résume en deux mots qui englobent toute la vie : Nuit et Jour. Jeudi dernier, je vous ai promis de prolonger à nouveau dans son versant JOUR mon billet du printemps dernier Danse des Sabres. J'avais déjà choisi pour l'occasion ce poème de Prévert que j'ai publié pour le 8 mars 2017, Journée internationale des femmes (au pluriel)
En relisant le poème affiché parmi les billets de mon blog contenant le mot JOUR, je m'aperçois que le mot n'y est pas lui-même. Mais il y est dans les autres mots ; dimanche, quartier désert, magasins fermés, ciel gris souris, jardins vaguement verts.

J'ai choisi ce poème parce que je le ressens aujourd'hui comme il y a quelques mois (hier) où je le présentais ainsi :
Celui-ci associe les rues de Paris avec ses hauts et ses bas quartiers de l'époque de Prévert qui est aussi mon souvenir et les femmes, "délurées" au sens premier et noble du terme, célébrées par le poète, tout au long de l'année et non un seul jour
Dans ce poème de Jacques Prévert, j'ai le pressentiment que cette jeune fille en noir et blanc sur le cliché d'Izis**, Prévert lui accorde le joyeux éveil, la délure de la modernité, sans débauche.


Enfants de la haute ville
filles des bas quartiers
le dimanche vous promène dans la rue de la Paix
Le quartier est désert
les magasins fermés
Mais sous le ciel gris souris
la ville est un peu verte derrière les grilles des Tuileries
Et vous dansez sans le savoir
Vous dansez en marchant sur les trottoirs cirés
Et vous lancez la mode
sans même vous en douter
Un manteau de fou rire
sur vos robes imprimées
Et vos robes imprimées sur le velours potelé
de vos corps amoureux
Tout nouveaux tout dorés
Folles enfants de la haute ville
ravissantes filles des bas quartiers
modèles impossibles à copier
Cover girls
colored girls
De la Goutte d'Or ou de Belleville
De Grenelle ou de bagnolet.
©Jacques Prévert,
Jacques Prévert et Izis, Grand bal du printemps***, 1951, 
Le cherche-midi 2008, page 134

Jacques Prévert, 1900 - 1977, poète et parolier, cinéaste, artiste français

** "déluré" quand j'avais pris connaissance du mot clé des jeudis en poésie du défi n°60 des CROQUEURS DE MOTS, piloté par Julien, m'est apparu le caractère particulièrement ambigu de cet adjectif, à la fois complimentant des qualités d'éveil et de vivacité d'esprit et désapprouvant l'audace et l'esprit de fronde ou d'indignation. Il est évident que la curiosité d'esprit ne fait pas bon ménage avec l'obéissance servile. Et pourtant, quoi de plus important pour la liberté de l'homme dans le respect de tous les autres, que de ne pas se laisser tromper.

Déluré, apparu au XVIIème siècle comme une variante du participe passé déleurré du verbe déleurrer = détromper


** p135 en regard du poème.
Le livre est né d'un proposition d'Izis à Prévert et à d'autres auteurs de mettre des textes sur ses photos.
Prévert a refusé. Mais pour une autre proposition bien plus intéressante : faire un livre à deux, où mots et photos s'associent en une puissante alchimie.

*** Mon avis : Grand bal du printemps est en fait un long poème d'une profonde unité, ... et d'une cruelle modernité.
J'ai trouvé avec un grand plaisir chez un libraire cette réédition d'un de ces livres qui ont enchanté mon enfance.






Je choisis ce poème qui fait écho dans une autre ville Erevan (Arménie), dans une autre époque actuelle, dans une actualité où des femmes osent parler. Pas partout et peut-être pas dans ce pays-là. Où des hommes, uniquement des hommes et heureusement pas tous, questionnent : "Mais comment fera-t-on la différence entre une attitude acceptable ou non ?" Curieusement, il n'y a guère ou pas du tout de femmes qui se posent la question. Parce que le poème de Prévert, respectueux et admiratif, est une bien belle réponse à cette question imbécile et que le clip vidéo, qui entretient je suppose volontairement l’ambiguïté d'une mise en scène ou non dès le début, est lui aussi éloquent.

9 commentaires:

  1. Je ne me souviens pas l'avoir lu un jour, merci Jeanne, bises

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  2. Magnifique ce poème de Prévert, et aussi cette vidéo où tout se déroule en plein jour, dans l'un comme dans l'autre ! Merci Jeanne ! J'♥ beaucoup ! Bonne journée de ce jeudi ! Bises♥

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  3. Je ne connaissais pas ce poème de Prévert : hommage aux femmes de Paris et je l'ai lu avec plaisir.

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  4. Merci pour cette belle page qui ouvre la porte au dialogue et au partage...

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  6. Il est tres beau ce poème de Prévert et répond bien à cette question posée en fin de billet en effet .
    Je ne connaissais pas la première signification de cet adjectif déluré .
    Bonne journée
    Bises

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  7. Merci, Fadosi, pour ce poème de Prévert dont je suis "un fan".
    Je suis également un fan d'Edith Piaf. Voici "je hais les dimanches, écrit par Charles Aznavour, chanté par la Môme : https://youtu.be/af3SH2by6Lo

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  8. Voilà un poème de Prévert que je ne connaissais pas. Merci pour cette belle découverte, comme tu le dis si bien, les jeux d'écriture témoignent de la vitalité de la langue française sans tapage.
    Bisous Jeanne.
    Domi.

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  9. C'est un poème que j'aime beaucoup.
    Je l'ai découvert il y a peu. J'ai encore beaucoup à apprendre.

    Pour ce qui est du débat actuel, je suis pour l'égalité, mais j'apprécie aussi la galanterie respectueuse qui hélas disparaît aujourd'hui.

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