Comme Martine, j'appréciais l'homme qu'il était, en tous cas qu'on devinait par ses alexandrins et ses commentaires.
Je suis d'accord avec Francine quand elle écrit :
"C'est un très grand Monsieur, dans tous les sens du terme, qui est "parti"."
Il est certains esprits...
[...]
Il est certains esprits dont les sombres pensées
Sont d'un nuage épais toujours embarrassées ;
Le jour de la raison ne le saurait percer.
Avant donc que d'écrire, apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément.
Surtout qu'en vos écrits la langue révérée
Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée.
En vain, vous me frappez d'un son mélodieux,
Si le terme est impropre ou le tour vicieux :
Mon esprit n'admet point un pompeux barbarisme,
Ni d'un vers ampoulé l'orgueilleux solécisme.
Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin
Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchant écrivain.
Travaillez à loisir, quelque ordre qui vous presse,
Et ne vous piquez point d'une folle vitesse :
Un style si rapide, et qui court en rimant,
Marque moins trop d'esprit que peu de jugement.
J'aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène,
Dans un pré plein de fleurs lentement se promène,
Qu'un torrent débordé qui, d'un cours orageux,
Roule, plein de gravier, sur un terrain fangeux.
Hâtez-vous lentement, et, sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :
Polissez-le sans cesse et le repolissez ;
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. [...]
Nicolas BOILEAU, Recueil : L'art poétique, 1669 - 1674
(Chant I), extrait
Souvent c'est l'extrait que les florilèges et les manuels donnent à découvrir ou commenter. C'est se priver d'une lecture en son entier qui vaut l'effort de prendre le temps et la réflexion. Laissez-moi au moins vous proposer encore les vers suivants
C’est peu qu’en un ouvrage où les fautes fourmillent,
Des traits d’esprit semés de temps en temps pétillent.
Il faut que chaque chose y soit mise en son lieu ;
Que le début, la fin répondent au milieu ;
Que d’un art délicat les pièces assorties
N’y forment qu’un seul tout de diverses parties,
Que jamais du sujet le discours s’écartant
N’aille chercher trop loin quelque mot éclatant.
Craignez- vous pour vos vers la censure publique ?
Soyez-vous à vous-même un sévère critique.
L’ignorance toujours est prête à s’admirer.
Faites-vous des amis prompts à vous censurer ;
Qu’ils soient de vos écrits les confidens sincères,
Et de tous vos défauts les zélés adversaires.
Dépouillez devant eux l’arrogance d’auteur ;
Mais sachez de l’ami discerner le flatteur.[...]
Nicolas Boileau, L'Art poétique, Chant I sur wikisource
Nicolas Boileau, 1636 - 1711, poète écrivain et critique français
Chouette, du grand art dans cette façon de dire les choses, merci Jeanne, bises
RépondreSupprimerJe pense vraiment qu'Henri aurait beaucoup aimé cela lui correspond bien. Bon jeudi.
RépondreSupprimerUn très beau texte de Nicolas Boileau, merci Jeanne
RépondreSupprimerBises et bon jeudi
un très bel hommage pour ce blogueur-
RépondreSupprimerje n'ai pas eu la chance de le connaitre-
bravo ! bisous et bonne soirée-
Un texte qu'il faut lire et relire, et, tu as raison, le lire autrement que dans les anthologies scolaires apporte davantage.
RépondreSupprimerMerci pour tout, Jeanne. Pensées pour Henri.
Un texte riche de sens. Merci Jeanne. Bises. Ce defi aura été un bel hommage à un homme bon.
RépondreSupprimerMais oui, Boileau, les alexandrins qui conviennent pour Henri de Margaux ! Merci beaucoup,Jeanne, bises.
RépondreSupprimerqu'il est souvent difficile d'exprimer ses émotions...
RépondreSupprimerje partage aussi la fin méfions nous des flatteurs !