Chaque jour je n'oublie pas Anne-Sophie et ses compagnes d'infortune de 145 en 2010 à 94 ou 103 ou 134 selon les sources en 2023

(clic sur le lien pour comprendre ... un peu)

vendredi 26 février 2016

L'art d'écrire, Dialogue avec Mallarmé

Complément au défi n°160 des CROQUEURS DE MOTS dont le deuxième opus poétique nous invitait à réfléchir sur les mystères de l'inspiration.

Ecrire, c'est déjà mettre du noir sur du blanc...
Longtemps ce fut aussi tracer au blanc de craie sur le noir ou le vert du tableau les belles cursives que l'élève s'appliquait à reproduire en pleins et déliés sur son cahier d'écolier aux pages blanches et quadrillées avec sa plume sergent-major trempée dans l'encre violette et que le maître d'école corrigerait à l'encre rouge.

Un poème est un mystère dont le lecteur doit chercher la clef. Nommer un objet, c'est supprimer les trois quarts de la jouissance du poème qui est faite du bonheur de deviner peu à peu ; le suggérer, voilà le rêve.
L'écriture n'existe que par et pour le ou les lecteurs. La prégnance du temps contraint a habitué les écrivants (orthographe assumée) à introduire en annonçant un cheminement, puis à résumer, maintenant à mettre un titre ou une phrase ou expression chapeau. Au risque que le lecteur se contente de ces raccourcis.

La chair est triste hélas, et j'ai lu tous les livres... La peau de Nana, dont nous avons tous caressé le grain....
Qui a en ce début de XXIe siècle le privilège de sentir sous ses doigts la couverture en cuir d'un livre ancien ou d'une édition rare ? Qui regrettera dans combien de décennies ces livres papier dont la fragile reliure résiste à peine à une ou deux lectures ?
Combien de vies faudrait-il maintenant pour lire tous les livres ? Savez-vous qu'en France, (alors que dire du monde), près de 10 livres sont édités par heure dont une moitié de nouveautés ?
J'en lis beaucoup à ma vitesse, qui ne va guère au-delà de 40 pages par heure et bien sûr je ne passe pas mon temps à lire. Le livre du futur évoluera encore par rapport à la liseuse mais à moins que les cerveaux bioniques soient démultipliés, la vitesse de lecture individuelle aura du mal à rattraper la production d'écriture.

L'enfantillage de la littérature jusqu'ici a été de croire, par exemple, que de choisir un certain nombre de pierres précieuses et en mettre les noms sur le papier, même très bien, c'était faire des pierres précieuses. Eh bien ! non ! La poésie consistant à créer, il faut prendre dans l'âme humaine des états, des lueurs d'une pureté si absolue que, bien chantés et bien mis en lumière, cela constitue en effet les joyaux de l'homme : là, il y a symbole, il y a création, et le mot poésie a ici son sens ; c'est, en somme, la seule création humaine possible. Et si, véritablement, les pierres précieuses dont on se pare ne manifestent pas un état d'âme, c'est indûment qu'on s'en pare...
Cette réflexion de Mallarmé est citée par Jules Huret dans Enquête sur l'évolution littéraire, 1891.
Une réflexion qui pourrait être étendue à l'ensemble de la littérature et des arts ou ce qu'on nomme tels. Magritte l'a illustré si astucieusement dans "La trahison des images" que "ceci n'est pas une pipe" a une réputation mondiale grâce au sous-titre devenu aussi célèbre que le sujet du tableau

Pas d'illustration de Magritte dont les œuvres ne sont  pas dans le domaine public

Ceci n'est pas une pipe non plus

En notre monde d'images omniprésentes, animées ou fixes, une réflexion sur les images mériterait sans doute plus que d'être encore balbutiante, sauf chez ceux qui les utilisent avec tant de dextérité es manipulation.
Comprendre n'est pas excuser.

7 commentaires:

  1. Bonjour Jeanne, dix livres par heure chez vous, eh oui que dire à travers le monde, que l'homme aime l'écriture ! Longue vie au livre.... bises de JB

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  2. Une bonne idée ce dialogue. C'est tout cela l'écriture. Retour en Vendée demain. Bon week-end et à lundi

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  3. Excellente page qui fait réfléchir. Merci Jeanne.
    Il parait que les perles que l'on porte continuent à vivre...

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  4. Bonjour Jeanne,

    J'ai beaucoup amé cet échange, "Un poème est un mystère, dont le lecteur doit chercher la clef". Ceci me rappelait mon professeur de Français, nous expliquant les alexandrins. C'est un parfait complément au défi des "Croqueurs" BRAVO !
    Bises bien amicales.

    Henri.

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  5. Nous ne lirons jamais tous les livres... même en lisant vite.
    Il faut prendre le temps de la découverte, mais ce n'est pas toujours facile.
    J'aime beaucoup ton dialogue, j'aimerais que tu le poursuives.
    Il y a tant de richesse dans ces livres...

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  6. Quand on aime lire et qu'on lit lentement, c'est assez frustrant d'autant que l'on ne s'aperçoit qu'au fil de la lecture si on a fait ou non un bon choix. Mais c'est ainsi, on ne peut tout lire ni voir tous les films ni entendre toutes les musiques ni ni ...
    Il y a mille façons de s'enrichir l'esprit ou de le remplir vainement
    bises et belle semaine Quichottine

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