La première raison de la servitude volontaire, c'est l'habitude
Un être qui s'habitue à tout, voilà je pense, la meilleure définition qu'on puisse donner à l'homme
Pour l'instant je vais juste m'arrêter sur cet étonnant bouleversement des habitudes et sur la rapidité de notre habituation et de la docilité de beaucoup à cette assignation à résidence.
Le point de départ de ma réflexion était plutôt le processus accéléré d'habituation, ce qui conduit à l'habitude, à l'accoutumance et à la diminution des réactions et non l'habitude elle-même.
Mais trouver un poème à partager sur ce mot ?
On évoque en ce moment beaucoup Albert Camus, du moins pour ses deux romans les plus célèbres, La peste et L'étranger. En écoutant l'auteur lire des extraits de ce dernier, je pensais à Hannah Arendt et à La banalité du mal. Je pensais plutôt à cette phrase prononcée par la mère dans sa pièce de théâtre Le malentendu représentée pour la première fois en 1944 :
"L'habitude commence la deuxième fois"
Albert Camus, Le malentendu, 1944
L'habitude est une manière usuelle d'être, de sentir et/ou de faire qui permet l'économie de la pensée.
Elle n'est pas bonne ou mauvaise en soi et elle est même fort utile quand elle est le résultat des apprentissages vitaux que sont la marche et le langage.
L’HABITUDE
La goutte d’eau de l’HabitudeCorrode notre libertéEt met sur notre volontéLa rouille de la servitude.Elle infiltre une quiétudePleine d’incuriosité :La goutte d’eau de l’HabitudeCorrode notre liberté.Qui donc fertilise l’étudeEt fait croupir l’oisiveté ?Qui donc endort l’adversitéEt moisit la béatitude ?La goutte d’eau de l’Habitude ! —
Maurice Rollinat, Les ÂmesLes Névroses, Fasquelle, 1917 (p. 40).
Maurice Rollinat, 1846 - 1903, poète et musicien français
Vous connaissez la fable de la grenouille ?
« Il n’est pas dépourvu d’importance que nous soyons presque toujours inconscients de la tendance de nos changements d’état.
Une fable quasi-scientifique raconte que, si vous arrivez à faire asseoir tranquillement une grenouille dans une casserole contenant de l’eau froide et que vous augmentez la température très lentement et progressivement, de manière qu’aucun moment ne soit marqué comme celui où elle devrait bondir dehors, eh bien, elle ne sautera jamais. Elle cuira.
L’espèce humaine, qui change son propre environnement en augmentant progressivement la pollution et se dégrade l’esprit en détériorant lentement la religion, l’éducation, se trouve-t-elle assise dans une telle casserole ? »
Gregory Bateson, « La Nature et la Pensée » (1979)
Je m'étais entre-temps souvenue que j'avais lu cet essai philosophique dans les années 1980 et que même je l'avais proposé au professeur de philosophie de mes élèves qui leur faisait étudier Hannah Arendt. Il me l'avait rendu en me disant que c'était trop compliqué pour eux. Je n'ai pas cherché à argumenter. Il avait sa logique et ses habitudes. C'était trop tôt, c'est encore trop tôt.
Peut-être parce que Hannah Arendt disait ils et que même cela était encore difficile. Alors si on se mettait à dire nous ...
Nous avons tous des habitudes,voire des manies, et depuis mars on a dû changer nos modes de vie, habitudes et... manies ! On s'y fait, mais c'est bon de se retrouver sans obligations tout de même ! Merci Jeanne, bises
RépondreSupprimerTrès intéressant écrit philosophique sur les habitudes qui sonht pour beaucoup rzssurantes. Je ne philosopherai pas plus loin car je n'en ai pas l'habitude et je n'aime pas trop. Bisous
RépondreSupprimerBelle dissertation philosophique qui va me trotter dans la tête avant de rejoindre les bras de Morphée, en y ayant pris mes louzous !
RépondreSupprimerUn petit message copié-collé :
Bien arrivée dans mon île, sans flotte, alors que sur la route, ce n'était pas la joie.
J'ai retrouvé mes repères, en galérant pour la remise en eau de la maison, le branchement de la batterie de la super 5, quelques courses, et la chasse aux araignées et aux cloportes.. beurk, beurk....
Demain sera un autre jour pour passer la serpillière et aller à la rencontre de mes amis "zanimaux".
Bises et bonne soirée
Ah ! Les habitudes, on y tient beaucoup et beaucoup trop parfois et, pourtant l'obligation d'un changement est souvent si bon ! Vérification faite, on en est pas malheureux (ses) pour autant.
RépondreSupprimerBonne fin de semaine Jeanne,
Bises♥
La situation actuelle a tout bouleversé... même mon rapport au blog, je dois l'avouer.
RépondreSupprimerUn grand merci pour tes pages de l'abécédaire.
Bises et douce journée.