Qui, parmi les usagers de la langue française et de sa poésie ne connait ce célèbre sonnet du poète prodige ? Tant qu'il alimente généreusement les fabricants de grilles de mots croisés ! Usage tellement réducteur de ce poème qui fait naître sous la puissante évocation de ses mots tant d'imaginaires toiles sublimes et terrifiantes !
VOYELLES
A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu, voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes.
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombillent autour des puanteurs cruelles,
Golfe d’ombre ; E, candeur des vapeurs et des tentes,
Lance des glaciers fiers, rois blancs, frissons d’ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;
U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides
Que l’alchimie imprime aux grands fronts studieux ;
O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges :
— O l’Oméga, rayon violet de Ses Yeux !
Arthur Rimbaud, 1871, 1e edition revue Lutèce, 5 octobre 1883
Arthur Rimbaud, 1854 - 1891, poète français
C'est un poème que j'ai toujours aimé.
RépondreSupprimerMerci pour cette page, Jeanne.
Bises et douce journée.