Vous en ai-je déjà fait la confidence ? Mon père était casanier à un point que vous n'imaginez pas. L'hiver, il avait tant roulé sur de mauvaises routes par tous les temps et quelquefois en pleine nuit pour aller réparer les lignes électriques. Et dès la fin du printemps les jardins méritaient toute son attention. C'était l'époque des récoltes, des mises en bocaux à stériliser et des confitures. Alors quand il se décidait, c'était souvent impromptu et il fallait être prêt à partir dans l'heure.
Seulement voilà, c'était une agréable journée de mai du début des années 1960, le moment des plus belles marguerites. Et j'étais introuvable.
C'était aussi un jour de fin du monde annoncé, relayé pendant les jours précédents à la radio, l'une de ces dates qui devaient correspondre à une prédiction de Nostradamus. C'est du moins ce que j'entendais de plus audible du discours de la TSF bien plus discrète sur les risques atomiques, sur fond de guerre froide et d'essais nucléaires atmosphériques dans les déserts du Nevada et du Sahara ou les steppes de l'Asie centrale.
Je n'étais pas encore sortie de l'enfance et les nuances entre allégorie, parabole et simple métaphore étaient hors de ma compréhension.
Alors, autant pour échapper à des discussions philosophiques aussi déprimantes que passionnantes que pour tromper mon angoisse existentielle, j'avais marché jusqu'au calvaire des Gaillons à la quête d'une réponse improbable. L'heure fatidique de 13h13 n'avait conduit à aucun événement dans un ciel limpide et j'avais cueilli une pleine brassée de fleurs de talus sur le chemin du retour.
Je vous fait grâce du sermon de mon père et des reproches inquiets de ma mère. Inutile aussi de préciser que j'avais tu le mobile de mon absence, cette superstition ridicule, et ma honte d'y avoir cru.
L'après-midi nous laissait le temps de mettre le projet d'escapade à exécution et ce fut finalement une merveilleuse fin de semaine, à peine gâchée par les interminables bouchons du retour, nos routes de traverse faisant alors office d'itinéraires bis pour ceux qui regagnaient la grand' ville.
à découvrir le vendredi soir ou le samedi
avec les autres brins sur la page 144 de L'Herbier
photo Marine D |
base pour un photo montage fait en 2013 En ce moment c'est Métiers improbables |
Ces superbes marguerites ont fait remonter de biens jolis souvenirs Jeanne, merci pour la confidence !
RépondreSupprimerBises et bon vendredi
ma foi oui jolis souvenirs, car en dépit de ma superstition, je n'étais pas dans l'angoisse mais plutôt dans le "savourer l'instant présent" ... va savoir pourquoi ...
SupprimerJ'ai pris plaisir à lire tes souvenirs du temps, Jeanne ! Je me suis revue en ces années.
RépondreSupprimerBonne fin de semaine
Bises♥
J'ai adoré ton histoire Jeanne, merci et elle serait véridique que ça ne m'étonnerait pas !
RépondreSupprimerBises du matin
eh oui ! la détective Marine m'a démasquée ! bises
SupprimerMerci pour ce partage émouvant... et pour le rappel de notre marguerite, j'avais adoré ton bouquet et ta façon de participer aussi à la souscription.
RépondreSupprimerCelle d'aujourd'hui avance aussi... grâce à vous tous.
Je t'embrasse fort. Passe une douce journée.
L'enfance, ses mystères, ses secrets et ses découvertes, j'ai beaucoup aimé ton récit qui lève un voile de ton enfance... Les grandes personnes ne peuvent plus comprendre ce monde-là !
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